Salarié gréviste : coupable d’une faute lourde ?

Le licenciement pour faute lourde est assez rarement utilisé, car il implique de justifier la volonté d’un salarié de nuire à l’entreprise. Et cette preuve est difficile à apporter. Néanmoins, voici un exemple récent de la reconnaissance d’une faute lourde… commise par des salariés grévistes.

Un refus d’exécuter une décision de justice peut constituer une faute lourde

A l’occasion d’une grève, des salariés grévistes procèdent au blocage de leur entreprise, interdisant ainsi aux salariés non-grévistes de réaliser leur travail. L’employeur décide alors d’agir en justice pour que les grévistes libèrent les lieux.

Il obtient une décision de justice favorable à l’expulsion des salariés qui bloquent l’entrée à l’entreprise et en informe les intéressés. Cependant, ceux-ci persistent dans leur action encore 4 jours après que leur expulsion a été ordonnée. L’employeur les licencie alors pour faute lourde.

Et le juge a confirmé la faute lourde : les salariés qui participaient au blocage de l’entreprise avaient été informés, préalablement à toute action de l’employeur, que l’occupation des lieux était illicite et ont pourtant persisté à empêcher les non-grévistes de travailler. Ce comportement trahit donc une intention de nuire.

Attention à l’interprétation de cette décision : la faute lourde reconnue ici n’est pas liée au statut de gréviste ; c’est parce que des salariés grévistes, contraints de cesser tout blocage, n’ont pas libéré l’accès à l’entreprise que le licenciement pour faute lourde a été reconnu.

Retenez qu’aujourd’hui, l’intérêt du licenciement pour faute lourde est surtout symbolique car vous restez redevable de l’indemnité de congés payés. Néanmoins, une faute lourde reconnue vous permettrait d’agir éventuellement en responsabilité civile contre le salarié.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 3 mai 2016, n° 14-28353

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Immeuble « démembré » : qui paie (et déduit) les travaux ?

Dans l’hypothèse où un immeuble est démembré, la question se pose de savoir quel est le sort réservé aux travaux d’entretien et de réparation : qui a la charge des travaux entre l’usufruitier et le nu-propriétaire et qui peut en tenir compte, le cas échéant, pour le calcul des revenus fonciers si l’immeuble est loué ?

Immeuble démembré loué : une déduction répartie entre l’usufruitier et le nu-propriétaire

Un immeuble est dit « démembré » lorsque le droit de propriété est, en quelque sorte, réparti entre un usufruitier qui a le droit d’utiliser l’immeuble et d’en percevoir les revenus lorsqu’il est loué et un nu-propriétaire qui, lui, est titulaire du droit d’en disposer.

En présence d’un immeuble démembré, la prise en charge des travaux est répartie de la manière suivante, sur le plan strictement juridique :

  • l’usufruitier n’est tenu qu’aux dépenses d’entretien et de menues réparations ;
  • le nu-propriétaire doit assumer les grosses réparations, à moins que ces réparations n’aient été occasionnées par un défaut d’entretien de la part de l’usufruitier, auquel cas ce dernier doit aussi participer à leur prise en charge.

Si l’immeuble est loué, la question se pose de l’impact de ces travaux au regard de l’impôt sur le revenu. Comme nous venons de le rappeler, les loyers reviennent à l’usufruitier, lequel les soumet à l’impôt sur le revenu, et ce dernier pourra déduire de ses propres revenus fonciers les travaux d’entretien qu’il a payés pour calculer le montant net des revenus imposables.

Le nu-propriétaire est, de son côté, autorisé à prendre aussi en compte les travaux qu’il a pris financièrement en charge. Dans ce cas :

  • soit il est par ailleurs propriétaire de biens loués et ces dépenses viendront compenser les loyers imposables perçus par ailleurs ;
  • soit il ne dispose pas de revenus fonciers et ces dépenses de travaux viendront s’imputer sur son revenu global dans la limite annuelle de 10 700 € (la fraction qui excède cette limite est uniquement imputable sur les revenus fonciers perçus au cours des 10 années suivantes).

Mais attention : la déduction de ces travaux ne sera possible, tant pour l’usufruitier que pour le nu-propriétaire, que s’il s’agit de travaux d’entretien, de réparation et d’amélioration (pour un logement dans ce dernier cas). Il faut, en effet, rappeler que les travaux de construction, de reconstruction, d’agrandissement ne sont jamais déductibles, quelle que soit la personne qui les prend en charge.

Immeuble démembré non loué : une déduction possible ?

Dans l’hypothèse où l’immeuble n’est pas loué, l’usufruitier ne perçoit aucun loyer imposable. Ceci a pour conséquence que, ni l’usufruitier, ni le nu-propriétaire ne peuvent déduire les travaux dont ils auraient assumé la charge financière.

Toutefois, il faut noter une exception qui profite au nu-propriétaire : dans le cas où le démembrement de l’immeuble résulte d’une donation ou d’une succession, effectuée sans charge, ni condition (entre parents jusqu’au 4ème degré inclusivement), le nu-propriétaire peut déduire le coût des grosses réparations qu’il a pris en charge.

Concrètement, il peut déduire de son revenu global les travaux de grosses réparations, dans la limite annuelle de 25 000 € (l’excédent pourra être imputé dans les mêmes conditions au cours des 10 années suivantes).

Source : Réponse ministérielle Bussereau, Assemblée Nationale, du 17 novembre 2015, n° 75547

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L’utilisation du domicile du salarié doit être compensée…

Une entreprise reçoit une prise d’acte d’un de ses salariés qui lui reproche notamment une absence de local lui permettant d’exercer ses tâches administratives et de stocker son matériel professionnel. Il prétend que l’utilisation de son domicile à des fins professionnelles doit être indemnisée…

… Sauf si l’employeur met à disposition un espace professionnel adapté

Un salarié, ex-VRP, prend acte de la rupture de son contrat de travail. Il reproche à son employeur de ne pas avoir défini ses objectifs, lui permettant de prétendre à sa rémunération variable. En outre, il déplore avoir dû utiliser son domicile pour réaliser ses tâches administratives et stocker son matériel professionnel.

Pour sa défense, l’employeur rappelle qu’en application des règles applicables aux VRP, la garde des échantillons et collections confiés par l’employeur est une obligation inhérente au statut du salarié. Par ailleurs, les textes ne prévoient pas de compensation financière de cette tâche.

Ce qu’admet volontiers le juge… qui rappelle, néanmoins, que l’employeur doit mettre à la disposition du salarié un espace pour y accomplir ses tâches administratives et y stocker son matériel. Comme aucun espace de ce type n’a été mis à la disposition du salarié, celui-ci a été contraint d’utiliser son domicile à cette fin. En conséquence, il doit être indemnisé.

Source : Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, 14 avril 2016, 14-13305

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ISF : une réduction d’impôt en cas d’investissement dans une PME, sous conditions…

Un investisseur souscrit au capital d’une société et bénéficie, en contrepartie, d’une réduction d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Réduction d’impôt que l’administration va finalement lui refuser au motif que la société a cessé son activité au bout de 2 ans. Ce qui ne semble pourtant pas être une condition pour bénéficier de cet avantage fiscal…

Conserver les titres pendant 5 ans implique-t-il l’exercice d’une activité pendant 5 ans ?

Pour bénéficier de la réduction d’ISF en contrepartie d’une souscription au capital d’une PME, il faut, entre autres conditions, conserver les titres reçus en échange pendant au moins 5 ans. C’est donc ce à quoi s’est engagé l’investisseur lorsqu’il a souscrit au capital d’une société.

Mais cette société a cessé son activité au bout de 2 années. L’administration fiscale en a alors déduit que le bénéfice de la réduction d’ISF devait être refusé : elle estime, en effet, que la société bénéficiaire de l’apport en capital doit exercer son activité pendant au moins 5 ans.

Or, elle ajoute une condition là où il n’y en a pas estime le juge : le bénéfice de la réduction d’ISF suppose que le souscripteur conserve les titres pendant 5 ans, sans avoir pour corollaire que la société maintienne son activité pendant ce délai. Les textes ne prévoient pas une telle condition, du moins à l’époque des faits. Le souscripteur doit donc avoir gain de cause.

Aujourd’hui, les conditions ont changé à la faveur de la Loi de Finances rectificative pour 2015. Pour toute souscription réalisée à compter du 1er janvier 2016, les conditions doivent être satisfaites à la date de souscription au capital de la société et de manière continue jusqu’au 31 décembre de la 5ème année suivante.

En clair, il faut conserver les titres pendant au moins 5 ans et la société doit, pendant ce même délai, exercer une activité éligible au dispositif.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 2 février 2016, n° 14-24441

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ISF : n’oubliez pas vos comptes courants !

Un dirigeant, imposable à l’ISF, a déclaré le compte courant qu’il détient dans sa société pour le calcul de cet impôt, mais pour une valeur inférieure à celle de sa valeur réelle, selon l’administration qui rectifie son ISF en conséquence. Ce que conteste le dirigeant, considérant que la valeur déclarée correspond à la « valeur probable de recouvrement »…

ISF : un compte courant n’est pas un bien professionnel…

Au regard de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), il faut rappeler que le compte courant d’associé n’a pas la nature d’un bien professionnel, même s’il s’agit d’un compte bloqué pour une période plus ou moins longue : il doit donc être déclaré à l’ISF. La question qui se pose alors est donc de savoir pour quelle valeur il doit être soumis à cet impôt.

Un dirigeant a, pour le calcul de son ISF, déclaré la valeur du compte courant détenu dans sa société pour une valeur inférieure à sa valeur nominale. Ce qui se comprend, explique-t-il à l’administration fiscale, puisqu’il s’agit de sa valeur probable de recouvrement.

Or, l’administration rappelle que cette valeur probable de recouvrement correspond à la valeur nominale s’il n’est pas prouvé que le compte courant est difficilement recouvrable. Cette valeur probable de recouvrement va donc s’apprécier au regard de la situation économique de la société : situation financière, état des capitaux propres, niveaux de résultat, valeur des actifs, etc.

Dans cette affaire, l’administration relève que la société est bénéficiaire, et ce de manière constante, démontrant notamment qu’elle ne rencontrait pas de difficultés financières particulières : la société est régulièrement bénéficiaire, qu’elle détient des filiales elles-mêmes bénéficiaires et distributrices de dividendes, que ses capitaux propres sont en constante évolution, etc.

Ce qui convainc le juge qui décide que la valeur déclarée du compte courant ne correspond pas à la valeur probable de recouvrement qui, elle, correspond justement à sa valeur nominale.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre criminelle, du 23 mars 2016, n° 15-80953

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Un salarié à temps partiel peut-il accomplir 35 heures ou plus ?

Une entreprise propose à une salariée à temps partiel de remplacer temporairement son chef de service absent. Elle exercera donc de nouvelles fonctions, avec une nouvelle rémunération et une nouvelle durée de travail. A l’issue de cette période, la salariée refuse de reprendre ses fonctions à temps partiel. A juste titre ?

Une possibilité contractuelle d’effectuer des heures complémentaires

Une salariée demande la requalification de son CDI à temps partiel en CDI à temps complet : son employeur lui a souvent fait faire plus de 10 %, et jusqu’à 40 % d’heures complémentaires. Parfois, elle a travaillé plus de 40 heures par semaine. Elle estime, en outre, que la réalisation de ces heures complémentaires l’a empêchée de trouver un autre travail.

L’employeur se défend en rappelant que la salariée a signé plusieurs avenants prévoyant une augmentation temporaire de sa durée de travail. De plus, la salariée n’aurait jamais refusé d’effectuer ces heures complémentaires. Pour lui, la salariée doit donc réintégrer son poste à temps partiel.

Mais le juge a requalifié le contrat à temps partiel en contrat à temps complet : la réalisation d’heures complémentaires ne doit jamais porter, même temporairement, la durée du travail à un niveau égal à la durée légale de travail.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 31 mars 2016, n° 14-17323

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Etat des lieux d’un logement : tenir compte de la vétusté

A la fin du bail, pour l’établissement de l’état des lieux, il est nécessaire de tenir compte de la vétusté du logement et des équipements et éléments qui le composent. A compter du 1er juin 2016, vous pourrez adopter une « grille de vétusté »…

Etat des lieux : que faut-il entendre par « vétusté » ?

Aux termes de la location d’un logement, il n’est pas rare que des litiges apparaissent, ou du moins des contestations, quant à la prise en compte de la vétusté du logement. C’est pourquoi la Loi Alur a prévu que les modalités de prise en compte de la vétusté du logement loué soient précisées par un Décret. Et c’est chose faite, ces nouvelles modalités s’appliquant à compter du 1er juin 2016.

En préambule, il faut savoir que la vétusté s’entend de l’état d’usure ou de détérioration résultant du temps ou de l’usage normal des matériaux et éléments d’équipement dont est constitué le logement.

Afin de limiter les litiges, il est désormais admis que le locataire et le bailleur pourront convenir, dès la signature du bail, d’une grille de vétusté, choisie parmi celles ayant fait l’objet d’un accord collectif de location, même si le logement en cause ne relève pas du secteur locatif régi par l’accord. On peut ici regretter que le pouvoir réglementaire ne soit pas allé plus loin, comme il peut en avoir l’habitude, et n’ait pas décidé d’imposer une grille de vétusté qui s’appliquerait à tous.

Notez que la grille de vétusté doit définir, au minimum, pour les principaux matériaux et équipements du bien loué, une durée de vie théorique et des coefficients d’abattement forfaitaire annuels affectant le prix des réparations locatives auxquelles serait tenu le locataire.

Une fois la grille de vétusté choisie, il apparaît prudent de l’annexer au bail, même si la réglementation ne l’impose pas, pour prévenir toute contestation future.

Source : Décret n° 2016-382 du 30 mars 2016 fixant les modalités d’établissement de l’état des lieux et de prise en compte de la vétusté des logements loués à usage de résidence principale

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