Prélèvement à la source : effectif… en 2018 !

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A compter du 1er janvier 2018, l’impôt sur le revenu dû sur les rémunérations, les bénéfices professionnels des indépendants et les revenus fonciers seront prélevés à la source : par qui, pour quel montant, comment ? Nous sommes désormais définitivement fixés sur les réponses à ces questions qui ne seront pas sans conséquences pour les bénéficiaires des revenus et les entreprises qui les versent…

Un prélèvement à la source pour les revenus salariaux

Le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu (et des prélèvements sociaux afférents aux revenus concernés par ce prélèvement à la source) est effectif à partir du 1er janvier 2018.

Pour les revenus salariaux (ainsi que les pensions de retraite, les allocations chômage, les indemnités journalières de sécurité sociale, etc.), ce prélèvement prendra effectivement la forme d’une retenue à la source.

Cette retenue sera calculée sur la base du montant imposable, après déduction de cotisations sociales et de la fraction déduction de la CSG, mais avant application de la déduction au titre des frais professionnels (et de l’abattement de 10 % sur les pensions de retraite).

Un acompte pour les revenus des indépendants et les revenus fonciers

Pour les titulaires de bénéfices professionnels (bénéfices industriels et commerciaux – BIC – bénéfices non commerciaux – BNC – bénéfices agricoles – BA), le prélèvement à la source va prendre la forme d’un acompte calculé sur la base des revenus effectivement soumis à l’impôt sur le revenu (et selon les modalités de calcul du régime d’imposition applicable), diminués des éventuels reports déficitaires.

Pour les titulaires de revenus fonciers, le prélèvement à la source prend, là encore, la forme d’un acompte calculé sur le montant de revenus fonciers nets imposables, diminués des reports déficitaires.

Pour les pensions alimentaires et les rentes viagères à titre onéreux, l’acompte est calculé sur les montants nets imposables après déduction des frais professionnels (ou de l’abattement de 10 % sur les pensions de retraite).

Pas de prélèvement à la source pour les autres revenus

Les plus-values immobilières, les revenus de capitaux mobiliers, les plus-values liées à la vente de titres, ainsi que certains avantages liés à l’attribution d’actions gratuites et à l’actionnariat salarié ne sont pas concernés par le prélèvement à la source.

Ces revenus sont, soit imposés au moment de leur réalisation, soit imposés selon les règles actuellement en vigueur (déclarés en année N et imposés en année N+1).

Un taux calculé par l’administration

Le taux du prélèvement est calculé par l’administration qui reste le seul interlocuteur du contribuable sur la base :

  • des impôts et des revenus de l’avant-dernière année pour le calcul des prélèvements et des acomptes des mois de janvier à août ;
  • des impôts et des revenus de l’année précédente pour le calcul des prélèvements et des acomptes des mois de septembre à décembre.

Ce taux est calculé sans tenir compte des réductions et des crédits d’impôts : ces derniers seront donc pris en compte uniquement au moment de la déclaration de revenus annuelle, qui reste maintenue pour déterminer le montant de l’impôt sur le revenu finalement dû. Notez cependant qu’à compter de l’imposition des revenus 2017, un acompte sur le montant des crédits d’impôt liés aux services à la personne et à la garde d’enfants sera versé au plus tard le 1er mars (il est égal à 30 % du montant obtenu au titre de l’imposition des revenus de l’année N-2).

Quelques précisions méritent d’être signalées à propos du taux du prélèvement à la source :

  • un taux par défaut (le « taux neutre ») calculé à partir de grilles de taux est appliqué aux primo déclarants ainsi qu’aux salariés qui souhaitent, par souci de confidentialité, que leur employeur ne connaisse par le taux d’imposition : dans ce cas, les salariés devront éventuellement verser spontanément un complément si la retenue calculée à partir du taux neutre s’avère inférieure à celle qui aurait été versée en application du taux réel ;
  • le taux du prélèvement du foyer constitué de contribuables mariés ou pacsés peut être individualisé pour l’imposition des revenus personnels (les revenus communs du foyer restent soumis au taux de prélèvement unique déterminé pour le foyer) ;
  • le taux du prélèvement à la source est modifié en cas de mariage, de Pacs, de décès, de divorce, de rupture de Pas, de naissance ou d’adoption d’un enfant mineur ;
  • le montant prélevé peut être modulé à la demande du contribuable, à la hausse ou à la baisse, sous sa responsabilité (une modulation excessive à la baisse pourra entraîner une pénalité de 10 %).

Un impôt reversé par l’entreprise

Pour les revenus soumis à la retenue à la source, l’entreprise sera tenue de récupérer chaque mois le taux du prélèvement calculé par l’administration ou appliquer le taux neutre, prélever la retenue à la source correspondante sur les revenus avant leur versement aux bénéficiaires et déclarer et reverser cette retenue à l’administration.

Le reversement de la retenue sera effectué :

  • soit le mois suivant celui au titre duquel aura lieu le prélèvement,
  • soit le mois du prélèvement si la paie est versée postérieurement à la période d’emploi,
  • soit, pour les entreprises de moins de 11 salariés, sur option, le mois suivant le trimestre au cours duquel ont eu lieu les prélèvements.

L’ensemble des échanges d’informations se fera via la déclaration sociale nominative (DSN), étant précisé que la communication du taux applicable en 2018 devrait être communiqué au cours du second trimestre 2017.

L’entreprise est seule responsable de la collecte et du reversement de la retenue à la source : en cas de retard, d’insuffisance, de défaut de reversement, l’entreprise s’expose à des majorations et amendes dont le taux varie de 5 % à 80 %.

Un acompte calculé et prélevé par l’administration

Pour les titulaires de revenus professionnels (BIC, BNC, BA) et les revenus fonciers soumis à un acompte, il revient à l’administration d’en déterminer le montant. Cet acompte est ensuite versé par 12ème au plus tard le 15 de chaque mois ou, sur option, par ¼ au plus tard les 15 février, 15 mai, 15 août et 15 novembre.

Cet acompte sera prélevé directement sur le compte bancaire des redevables. Notez que, comme pour la retenue à la source, le montant prélevé peut être modulé à la demande du contribuable, à la hausse ou à la baisse, sous sa responsabilité (une modulation excessive à la baisse pourra entraîner une pénalité de 10 %).

Une déclaration de revenus annuelle

La déclaration de revenus n’est pas supprimée : chaque année, il faudra toujours déposer une déclaration portant sur les revenus perçus au cours de l’année précédente.

Le maintien de cette déclaration se justifie par la nécessité d’imposer les revenus qui ne sont pas soumis au prélèvement à la source et par la prise en compte de éventuels crédits et réductions d’impôt dont vous pouvez bénéficier.

La régularisation qui en résultera donnera lieu, soit à un excédent qui fera l’objet d’un remboursement, soit d’un solde restant dû qui sera prélevé par l’administration (en plus des retenues à la source ou des acomptes se rapportant aux revenus de l’année en cours).

2017 : une (fausse ?) année fiscale blanche

La mise en place du prélèvement à la source entraîne un risque de double contribution à payer en 2018 correspondant :

  • d’une part au paiement de l’impôt dû à raison des revenus de l’année 2017 et imposés en 2018 ;
  • d’autre part au paiement du prélèvement à la source (retenue ou acompte) à raison des revenus de l’année 2018.

Une mesure transitoire est donc prévue pour neutraliser l’imposition des revenus de l’année 2017, tant au niveau de l’impôt sur le revenu que des prélèvements sociaux. Mais, pour éviter toute optimisation fiscale, cette neutralisation fiscale, qui prend la forme d’un crédit d’impôt (le crédit d’impôt modernisation du recouvrement – CIMR) ne vise que les revenus non exceptionnels.

Ce crédit d’impôt est égal au montant de l’IR dû au titre de l’année 2017 multiplié par le rapport entre les montants nets imposables des revenus non exceptionnels (les déficits étant retenus pour une valeur nulle) et le revenu net imposable au barème progressif de l’IR (hors déficits, charges et abattements déductibles).

Ce crédit d’impôt s’imputera sur l’IR dû au titre de l’année 2017, après imputation des réductions et des crédits d’impôt (qui restent maintenus afin d’éviter de décourager les investissements ouvrant droit à ces avantages fiscaux).

Sont donc neutralisés, pour le calcul de l’impôt sur le revenu de l’année 2017, les revenus non exceptionnels. Sont concernés :

  • les revenus imposés comme des traitements et salaires susceptibles d’être recueillis annuellement (sont donc exclus les indemnités de rupture de contrat, de cessation de mandat social, de départ à la retraite, les sommes versées au titre de l’épargne salariale non affectées à un plan d’épargne, les gratifications accordées sans lien avec le contrat de travail, etc.) ;
  • les revenus fonciers nets imposables non exceptionnels (ne sont donc pas pris en compte les revenus fonciers dits exceptionnels comme, par exemple, les subventions, les arriérés de loyers, les indemnités de pas-de-porte, etc.) ;
  • les revenus des travailleurs indépendants : sera considéré comme non exceptionnel le plus faible des deux montants suivant, à savoir le bénéfice imposable de l’année 2017 ou le plus élevé des bénéfices imposables des années 2014, 2015 et 2016 (pour celles et ceux qui ont démarré leur activité en 2017, un ajustement sera opéré en 2019 en tenant compte des revenus perçus en 2018) ;
  • les revenus salariaux des dirigeants : le montant des rémunérations des dirigeants neutralisé sur le plan fiscal correspondra au plus faible des deux montants, à savoir le montant net imposable en 2017 ou le montant net imposable le plus élevé au titre des années 2014, 2015 et 2016 (là encore, un ajustement sera effectué en 2019 pour celles et ceux qui perçoivent pour la 1ère fois en 2017 des revenus salariaux pour l’exercice de fonctions de dirigeant).

Au-delà de ces mesures anti-optimisation, qui visent notamment les revenus des indépendants et des dirigeants, d’autres mesures sont prévues pour éviter toute optimisation fiscale.

En premier lieu, l’administration sera en droit de réclamer des justifications sur tous les éléments, revenus, produits qui ont servi de base de calcul au crédit d’impôt. En outre, il est expressément prévu que le délai pendant lequel l’administration est en droit de contrôler l’impôt sur le revenu, normalement fixé à 3 ans, soit étendu à 4 ans pour l’impôt sur les revenus de l’année 2017. Enfin, il est précisé que le crédit d’impôt ne peut concerner que les revenus déclarés spontanément : des revenus imposés après mise en demeure ne seront pas neutralisés, même s’il s’agit de revenus non exceptionnels.

En second lieu, des mesures spécifiques sont prises en matière de revenus fonciers afin d’éviter tout décalage de dépenses déductibles des revenus fonciers. Ainsi :

  • lorsqu’elles sont effectivement déductibles, les charges courantes hors travaux (primes d’assurance, charges de copropriété, taxes foncières, intérêts d’emprunt, frais de gestion, honoraires d’agences, etc.) exigibles en 2017 seront déduites des revenus fonciers de l’année 2017, quelle que soit l’année de paiement effectif ;
  • des mesures particulières sont prévues pour la déduction des travaux :

o les travaux décidés par le bailleur et payés en 2017 sont intégralement déductibles des revenus de l’année 2017 ;

o les travaux décidés par le bailleur et payés en 2018 sont déductibles pour un montant égal à la moyenne des dépenses de travaux payés en 2017 et 2018 (ne sont pas concernés les travaux d’urgence, les travaux décidés d’office par le syndic et les travaux se rapportant à des immeubles acquis en 2018) ;

o les provisions pour travaux dans les copropriétés correspondant à des charges déductibles supportées par le bailleur en 2017 sont déductibles des revenus fonciers imposables en 2018 pour 50 % de leur montant ;

o pour le calcul du revenu foncier de l’année 2019, les provisions pour charges de copropriété sont diminuées à hauteur de 50 % du montant des provisions pour travaux supportées en 2018 correspondant à des charges déductibles.

Source : Loi de Finances pour 2017 n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 (articles 60 et 82)

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